LE DIT DU DERSERT

 

Danielle Feniou

 

 

La poésie est un noeud

de feu et les mots

coulées de métal

 

Dans cet incendie

qui ravage

une voix danse

au dessus des larmes

 

Le chant d’un ramier

perdure au fond

de mon désert.

 

 

 

Au bord du mirage

la fascination de la dune

le frisson de l’erg

s’estompent

Un pan de brume

nargue le vide

Tu observes le silence

d’autres t’habitent.

 

Au bord du ciel

le cri des oasis

s’enflamme

 

Les roses sont de sable.

 

 

 

J’ai tiré sur le fil

de la nuit

Les étoiles

une à une

sont venues

éclairer le silence

l’espace d’un sourire

 

Au matin

il a fallu

laisser le jour

tisser l’ombre

et boire

le thé de rosée.

 

 

 

 

J’entends ton nom

ô obsession

Monte des sables

l’oud de nostalgie.

Je lis ton nom

aux lettres cassées

arêtes brisées

sur le silex des puits

J’écris ton nom

sur le sel déposé

le silice

des déserts rêvés

 

J’effacerai ce nom

de ma mémoire en feu

Mirage de braises

dispersées.

 

 

 

Ta voix résonne encore

surgie du silence

Un cri de chair

au pourtour de l’ombre

 

Vibrant avec toi

mon signe

le bruit des nuages.

 

 

 

 

A l’ombre des étoiles

ne germent plus

les fleurs de l’air

 

Dans les graines

de lumière

éclatent les noeuds

qui déchirent

et tuent

Nul cri

 

Tôt le matin

l’espace se tait.

 

 

 

Je voulais encore

en son regard

entrer un peu

et sur la page

encore entendre

la voix kabyle

éveiller le jasmin

le musc le basilic.

Je voulais tenir encore

le fil des mots

et tresser des déserts

dans la lumière.

 

S’échappaient

autour de sa bouche

ces rondeurs voyelles

au milieu du menton

se creusait l’oasis

et se perdait l’oued

 

Je voulais ramasser

une poignée du sable

qu’il me donnait

Le bruit soudain

a emporté

dans sa rafale

le thé qui fleurissait.

 

 

 

 

Il est des pierres

qui suintent parfois

à grands cris

 

et goutte à goutte

sculptent le silence

Ô désert.

 

 

 

Nous sommes gouttes de pluie

dans les épines du vent

mémoire des jours

arrachés au temps.

 

 

 

 

J’ai ramassé

des brindilles de mots

ourlées de fumée

Dans la nuit béante

je buvais des braises

J’ai parlé

noué ma voix

aux branches du désir

incandescente

dans le tison du jour.

 

 

 

Attacher la nuit

enlacer les étoiles

de tes mots

 

Respirer leur souffle

et retenir le cri

dans l’ombre

 

Entendre l’envol

des caresses avides

des étreintes

 

Zone blanche

pulpe odorante

des visions

 

Ksar

désert

 

 

Imprenable.

 

 

 

 

Ô toi qui me regardes

dis-moi ce qui

s’envole vers les étoiles

ce qui respire l’attente

 

Dis-moi quel mot

a réuni nos souffles

quel espoir a tracé

l’alphabet du désir 

 

Parle-moi des flambées

allumées dans l’ombre

des délivrances bleues

 

Donne-moi enfin

la réponse du silence .

 

 

 

Editions Associatives Clapas - Les Ami(e)s à Voix n°128 - Décembre 2001